Washington, 05 oct 2012 (SPS) Le département d’Etat américain a adressé au Congrès un rapport critique sur la violation des droits de l’homme par le Maroc au Sahara occidental, affirmant que la situation soulève "de sérieuses inquiétudes".
Ce rapport a été élaboré par le département de Hillary Clinton en application d’une loi adoptée en décembre 2011 par le Congrès américain, qui exige du département d’Etat de s’assurer du respect des droits de l’homme au Sahara occidental avant l’octroi de toute aide financière militaire au Maroc.
Ce texte législatif, rappelle-t-on, stipule qu’avant l’affectation de cette aide financière, le département d’Etat doit "soumettre un rapport aux Comités d’affectation des crédits relevant de la Chambre des représentants et de Sénat, sur les mesures prises par le gouvernement marocain en matière de respect des droits des personnes d’exprimer pacifiquement leurs opinions concernant le statut et l’avenir du Sahara occidental", et doit aussi "élaborer un rapport sur la situation des droits de l’homme des Sahraouis".
A travers cette loi, le Congrès a également conditionné l’aide financière militaire américaine fournie au Maroc par "le droit d’accès au Sahara occidental, sans aucune entrave, des organisations des droits de l’homme, des journalistes et des représentants des gouvernements étrangers".
Dans son rapport établi afin de se mettre en conformité avec ces nouvelles dispositions législatives du Congrès américain, le département d’Etat a noté, tout d’abord, que "le Sahara occidental est un territoire non autonome sur lequel le Maroc revendique la souveraineté, une position qui n’est pas acceptée par la communauté internationale".
Rappelant que le Conseil de sécurité de l’ONU avait créé en 1991 la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) "pour permettre au peuple du Sahara occidental d’opter soit pour l’indépendance soit pour l’intégration au royaume du Maroc"‘, le département d’Etat a tenu à préciser que "les Etats-Unis ont récemment renouvelé leur soutien à la MINURSO à travers l’adoption de la résolution 2044 du Conseil de sécurité" de l’ONU en avril dernier.
Néanmoins, souligne le département de Hillary Clinton, "le référendum n’a jamais eu lieu. Le Sahara occidental demeure, de facto, sous l’autorité administrative marocaine, et ce, bien que le Maroc ne soit pas reconnu par l’ONU comme puissance administrante du Sahara occidental."
Ces précisions rappelées, le département d’Etat a informé le Congrès que "la situation générale des droits de l’homme dans les territoires sahraouis soulèvent un certain nombre de sérieuses inquiétudes, dont les limitations à la liberté d’expression et de réunion, le recours à la détention arbitraire et les abus physiques et verbaux contre les détenus lors des arrestations et emprisonnements".
Concernant les droits des individus à exprimer leur opinion sur le Sahara occidental, le rapport américain note que le Maroc considère que les revendications prônant l’indépendance du Sahara occidental constituent "une atteinte grave à la sécurité".
"A ce titre, il existe des restrictions continues, en particulier pour les droits de réunion pacifique et les publications qui appellent à l’indépendance ou à un référendum qui inclurait l’indépendance comme option", constate le département d’Etat.
Dans ce sens, il rapporte que "les grandes manifestations sur les droits de l’homme ou toute manifestation en faveur spécifiquement de l’indépendance des territoires sahraouis sont strictement interdites par la loi" au Maroc.
Pire encore, ajoute le rapport, "les personnes arrêtées pour avoir protesté contre l’intégration du Sahara occidental au Royaume du Maroc n’ont pas toujours bénéficié d’un procès public équitable". Aussi, "la distribution de tracts appelant à l’indépendance du Sahara occidental ou à un référendum qui inclurait cette option, est interdite", poursuit le département d’Etat qui précise que le gouvernement marocain "refuse également l’accès à des sites Web à controverse, comme ceux prônant l’indépendance" du Sahara occidental.
Le rapport n’a pas manqué de signaler que "la loi marocaine interdit aux citoyens d’exprimer leur opposition à la position officielle du gouvernement à l’égard du Sahara occidental".
Aussi, affirme-t-il, "la plupart des médias et des blogueurs pratiquent l’autocensure sur cette question", tandis que "les blogueurs, qui suspectent être étroitement surveillés par les autorités marocaines, sont amenés alors à occulter leur identité".
Le Congrès américain a été également informé par le département d’Etat que "les organisations qui sont considérées par le gouvernement marocain comme non soumises à la souveraineté marocaine ont des difficultés pour obtenir un agrément ou pour activer librement".
En conséquence, "les organisations non agréées ne peuvent ni accéder à des fonds publics ni accepter des contributions financières et ont des difficultés à obtenir l’autorisation pour organiser des réunions publiques", déplore le rapport qui cite le cas notamment de l’Association sahraouie des victimes des violations graves des droits de l’homme (ASVDH) et du Collectif des défenseurs des droits de l’homme au Sahara occidental (CODESA).
Dans son rapport adressé aux élus américains, le département d’Etat a également évoqué la visite effectuée au Sahara occidental, en août dernier, par une délégation de la Fondation américaine Robert F. Kennedy pour la justice et les droits de l’homme (RFK Center) qui avait dressé, rappelle-t-on, un rapport accablant sur le Maroc pour sa violation des droits de l’homme des Sahraouis.
La délégation de RFK Center, note le département d’Etat, a fait état dans son rapport ‘‘des graves violations des droits de l’homme commises au Sahara occidental".
Le département d’Etat indique, en outre, que "le gouvernement marocain applique des procédures strictes qui limitent considérablement la capacité des ONG et des militants de rencontrer les journalistes", précisant que les journalistes étrangers doivent obtenir l’autorisation officielle préalable du ministère marocain de la Communication, avant de rencontrer des ONG favorables à l’indépendance du Sahara occidental.
Concernant la création par le Maroc du Conseil national des droits de l’homme (CNDH) en 2011 dans le sillage des réformes politiques, le rapport a fait savoir que "les responsables américains ont exhorté le Maroc de publier, tel qu’il a promis, le rapport 2011 des droits de l’homme dont un rapport spécifique sur la situation des droits de l’homme au Sahara occidental.’’
Le département d’Etat souligne, toutefois, que "le Maroc refuse une présence permanente d’un bureau du Haut-Commissaire de l’ONU des droits de l’homme ou un mécanisme des droits de l’homme dans le cadre de la MINURSO". (SPS)
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