Alger, 23 nov 2020 (SPS) Le diplomate et ancien ministre, Abdelaziz Rahabi a estimé ,lundi, que la situation actuelle au Sahara occidental suite à l’agression militaire marocaine à El-Guerguerat devrait relancer le processus politique selon un nouvel agenda pour sortir du statu quo qui dure depuis des décennies.
Dans un entretien accordé au journal algérien arabophone El Khabar, M. Rahabi a affirmé que les Sahraouis tendent, à travers leur réaction à l’agression marocaine, à "sortir du statu quo en recourant aux armes comme ultime solution après avoir tenté les négociations et fait preuve de patience".
Les derniers développements survenus devraient "relancer le processus politique sérieusement suivant un engagement et un agenda bien déterminés, et non par le simple principe de le relancer", confie le diplomate qui fait part également de "l’appréhension ressentie en Europe de voir ce conflit politique se transformer en foyer de tension et menacer, partant, la sécurité et la stabilité de la région".
En recourant aux armes, les Sahraouis "ne voudraient en aucun cas trainer la région dans une spirale de violence et d’instabilité. Bien au contraire, ils aspirent à relancer ce processus politique et diplomatique pour sortir de la situation actuelle", a-t-il soutenu.
Les observateurs, aux faits de ce dossier, savent très bien que "les événements qui se produisent aujourd’hui étaient bel et bien attendus, compte tenu du statu quo maintenu depuis 1991, sachant qu’entre 1975 et 1991, les Sahraouis ont mené une guerre armée qui a débouché sur l’impératif d’un cessez-le-feu et de pourparlers immédiats pour le recensement de la population sahraouie".
Estimant que le précédent processus politique "s'est soldé par un échec", M. Rahabi a relevé que "tous les pays ont exercé une pression sur la partie sahraouie pour l’amener à cesser la guerre dans cette région". Cette pression a été motivée par les garanties avancées par l'ONU, qui ne les a d’ailleurs pas tenues, ce qui fait porter à cette dernière une responsabilité directe, indépendamment de la responsabilité politique de la France et de la responsabilité historique de l’Espagne qui demeure la puissance administrante dans la région au regard du Droit international, a-t-il ajouté.
Pour M. Rahabi, la solution pacifique a permis au Maroc de "gagner du temps", grâce, a-t-il ajouté, à "ses accointances aux Etats-Unis d’Amérique (USA), à ses alliances avec les pays du Golfe et au soutien inconditionnel que lui apporte un membre au sein du Conseil de sécurité, qui est la France". D'autres puissances ont, aussi, "des intérêts directs et des agendas propres à eux au Sahara Occidental", a-t-il expliqué.
A la question de savoir si la cause sahraouie constituait véritablement une entrave au processus d'édification de l’Union maghrébine, l’ancien ministre considère que cette thèse "est totalement contraire à l’Histoire", tout en étayant ses propos sur des preuves historiques. Et d’ajouter : "le responsable du gel du processus maghrébin est le Maroc et non la cause sahraouie".
Dans le même cadre, il a salué la position officielle "constante" de l'Algérie à l'égard de la cause sahraouie depuis 1975, relevant que plusieurs pays avaient tenté de "faire pression sur l'Algérie pour changer sa doctrine en matière d'affaires étrangères". Ces tentatives ont été vaines devant la solidité de la politique étrangère algérienne qui puise se force des expériences passées en sus de faire l'objet d'un consensus national, a-t-il expliqué.
Mettant en garde contre des contenus et des Fake-news diffusés par plusieurs pays ayant une forte présence sur la toile en Algérie, M. Rahabi a relevé la nécessité de se doter d'un "système médiatique fort qui se met au diapason de la diplomatie et des positions de l'Etat".
Interrogé sur le communiqué émis par l'UA au sujet de l'agression marocaine, M. Rahabi dira qu'il s'agit d'un "communiqué diplomatique" que l'Organisation panafricaine a voulu être "équilibré". Il a noté, tout de même, un nouvel élément dans ce communiqué, à savoir la disposition de l'UA à être partie prenante dans l'action diplomatique, après s'en être éloignée et l'Algérie l'a condamné, a-t-il dit.
M.Rahabi n'a pas écarté des pressions françaises sur le Maroc pour l'amener à amorcer des négociations "sérieuses et directes", rappelant que l'organisation d'un référendum d'autodétermination "a été d'abord une revendication marocaine formulée par le souverain Hassan II en 1981 lors du sommet africain à Nairobi".
Cet engagement, marocain de surcroit, ne peut pas être changé "car n'arrangeant pas les intérêts du Maroc ou de ses alliés", a ajouté M. Rahabi, relevant que l'Algérie "tient compte de la morale dans sa politique étrangère. Le pragmatisme ne saurait se faire aux dépens des valeurs". (SPS)
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