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Le Sahara Occidental, dernière colonie d'Afrique

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Le Sahara Occidental, dernière colonie d'AfriqueInterview de Malainin Lakhal
 

 
 
African Democratic Institute (ADI) المعهد الديمقراطي الأفريقي 
 
Traducido por  Philippe Cazal
Editado por  Fausto Giudice Фаусто Джудиче فاوستو جيوديشي
 

Malainin Lakhal, 45 ans, est un traducteur, défenseur des droits humains et journaliste indépendant sahraoui. Il est membre de l'Observatoire sahraoui des Ressources naturelles. L’Institut démocratique africain l’a interviewé à l’occasion de la Journée de l’indépendance saharouie, le 27 fevrier.
 
 
A.D.I. : Comment était la vie au Sahara Occidental ?
Malainin : Grandir au Sahara Occidental occupé, c'est comme grandir dans un immense camp de détention à ciel ouvert. L'occupation militaire marocaine a maintenu un siège violent des différentes villes des territoires dès les premiers jours de l'invasion. De fait, l'invasion a commencé le 31 décembre 1975 par une vaste opération militaire qui a rasé des centaines de villages nomades sahraouis, faisant des milliers de victimes et autant de disparus ; à ce jour, on reste sans aucune nouvelle de plus de 600 de ces personnes disparues.
Et bien sûr, étant un enfant sahraoui, grandir dans les écoles marocaines sous la tutelle de maîtres marocains a été une expérience très difficile car ils nous traitaient de manière différente, comme l'on ferait avec n'importe quel peuple colonisé. Dans la classe, dans les rues, sur les terrains de jeux, les policiers nous traitaient en suspects ; ils nous interpellaient souvent, à la moindre chose. Ils nous appelaient "les sales sahraouis", "les chameliers". Nous étions habitués, tous ceux de ma génération et de la génération suivante, à être arrêtés dans la rue avec ou sans raison, à être emmenés aux commissariats, à être battus et torturés par les policiers marocains, qui voulaient simplement se divertir ou cherchaient à avoir une information spécifique, et à passer une nuit ou deux au cachot avant d'être relâchés. Nous avons aussi été nombreux à être emprisonnés pendant des périodes plus longues, et même certains d'entre nous ont disparu pendant longtemps ou pour toujours.
À l'école, nous étions discriminés. À cette époque il était difficile pour un Sahraoui d'aller jusqu'au bout de la scolarité. Les autorités coloniales faisaient leur possible pour nous décourager d'avancer dans nos études. Et atteindre l'université a tenu du miracle pour beaucoup d'entre nous. Ce traitement nous a amenés depuis notre enfance à avoir une grande conscience politique. Et bien sûr nous étions aussi politiquement actifs et nous avions tendance à faire tout notre possible pour rendre la vie difficile aux autorités coloniales, en particulier la nuit. Pour résumer, la vie dans les zones occupées du Sahara Occidental est la vie d'un peuple colonisé qui se bat pour sa liberté et que les colonisateurs répriment à cause de ce combat. La seule différence ici est que le colonisateur est un autre pays africain.
 
Que représente pour vous le Jour de l'Indépendance de votre pays ?
Il représente de nombreuses choses contradictoires. En premier lieu, je suis fier que mon peuple ait réussi, dans une période très difficile de son histoire, à déclarer sa volonté politique et à la traduire dans la constitution et dans la proclamation de la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD). Mais, jusqu'à ce jour, mon pays n'est pas complètement libre ni totalement indépendant. Les deux tiers de notre pays sont encore sous le joug de l'occupation militaire marocaine. Par conséquent, nous ne pouvons pas célébrer notre indépendance comme nous le souhaiterions.
Mais d'un autre côté notre Jour de l'Indépendance est aussi pour nous et pour le monde une façon de rappeler que quelque chose ne va pas au Sahara Occidental. C'est un message de notre peuple à ce qu'on appelle la communauté internationale selon lequel nous, les Sahraouis, nous avons décidé de notre futur et nous sommes prêts à le confirmer dans un référendum d'autodétermination si l'on nous permet de le faire. Sinon, notre choix est clair : Nous voulons être libres ! Il n'y a pas d'alternative à notre liberté ; c'est obligatoire ! Nous voulons construire notre État et notre Nation et nous sommes prêts à le faire ; nous avons déjà construit nos institutions, notre gouvernement, et celui-ci est parvenu, pendant plus de quarante ans, à diriger les seuls camps de réfugiés au monde dressés, administrés et organisés par les réfugiés eux-mêmes. Nous n'avons besoin que d'une chose, c'est que la France et sa protégée, la monarchie marocaine, nous laissent tranquilles et cessent de maintenir le néocolonialisme dans notre pays.
 
Le conflit territorial entre le Front Polisario sahraoui et le Maroc dure depuis 1975. Le Maroc refuse de reconnaître l'indépendance du pays. Comment voyez-vous la querelle (quel est le problème) et la manière dont elle a affecté votre pays ?
Le conflit du Sahara Occidental est clairement une question de décolonisation. Ceci n'est pas un point de vue mais un fait établi et confirmé par plus de 110 résolutions de l'ONU, de nombreuses autres résolutions de l'UA, de l'UE et d'autres organismes. La Cour Internationale de Justice elle aussi a émis un avis clair à l'adresse de l'Assemblée générale des Nations Unies en 1975, dans lequel elle affirme que le Sahara Occidental est un territoire non autonome, que le Maroc n'a pas de souveraineté sur ce territoire et que ce territoire a un peuple bien déterminé, les Sahraouis, lesquels, en accord avec cet avis de la CIJ, ont le droit inaliénable à l'autodétermination, qu'ils devraient exercer dans le cadre de la résolution 1514, en vertu de laquelle de nombreuses nations africaines ont obtenu leur indépendance dans les années soixante. La question est donc très claire sur le plan juridique, au point qu'aucun pays au monde ne reconnaît la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental.
Mais le Sahara Occidental est un territoire très riche, avec toutes sortes de ressources, renouvelables et non renouvelables. C'est l'une des principales raisons pour lesquelles le Maroc, appuyé par la France bien sûr, refuse de reconnaître, comme vous l'avez signalé, non seulement notre indépendance mais aussi notre propre droit à l'existence, à la liberté et à l'autodétermination.
De la même manière que les Sud-Africains ont autrefois souffert sous le régime de l'apartheid, nous continuons à subir, dans les zones occupées du Sahara Occidental, les arrestations arbitraires ; les manifestations pacifiques sont interdites et violemment réprimées ; nous avons actuellement environ 50 prisonniers politiques dans les prisons marocaines, dont beaucoup ont été jugés par des tribunaux militaires marocains, bien qu'il s'agisse de civils, en majorité des étudiants. Le régime marocain a commis, dans les années soixante-dix et quatre-vingt, des crimes contre l'humanité atroces qui sont attestés par des dossiers solides et il continue à commettre des violations qui sont de véritables crimes contre l'humanité, comme les disparitions forcées, les tortures, les exécutions sommaires, etc.
Donc, en résumé, le Sahara Occidental c'est une question de décolonisation où nous, les colonisés, nous luttons contre un régime militaire colonial violent qui refuse de reconnaître ou de permettre que le peuple décide de son futur et de son territoire.
 
La résistance du Front Polisario face aux forces marocaines est-elle de nature agressive ou bien le Front pratique-t-il la résistance passive ? Y a-t-il des affrontements violents qui se produisent ?
Rappelons que le Front Polisario a été créé en 1973 par un groupe de jeunes combattants sahraouis pour mener une lutte armée contre la colonisation espagnole. Quand le Maroc s'est acoquiné avec l'Espagne pour la remplacer illégalement, le Front Polisario a entrepris une guerre de guérilla contre la nouvelle puissance coloniale, qui allait durer 16 ans, et il a réellement réussi à occasionner des dommages importants à la monarchie alaouite et à son armée. Ce net succès du Polisario a obligé l'ex-roi du Maroc, Hassan II, à accepter le plan de règlement de l'OUA et de l'ONU en 1991 ; selon ce plan, l'ONU devait organiser un référendum d'autodétermination avec trois options : l'indépendance, l'intégration au Maroc ou une autre forme d'association avec une autre entité.
Pendant ces années de guerre la résistance civile sahraouie existait aussi, bien que sous forme d'organisations clandestines destinées à sensibiliser les gens, à structurer un soutien au Polisario et, parfois, à réaliser des opérations de sabotage contre les institutions marocaines et les forces militaires et de police.
Après l'installation par l'ONU de sa Mission, la Minurso, la résistance sahraouie a opté pour des manifestations pacifiques et a orienté son combat vers l'activisme de la société civile en défense des droits humains, des ressources naturelles et des revendications sociales. Cette résistance pacifique se poursuit à ce jour ; elle est menée par une société civile sahraouie active en parallèle avec les actions diplomatiques et politiques officielles sahraouies.
Le Maroc est devenu récemment le 55e État membre de l'Union Africaine. Comment cette nouvelle a-t-elle été reçue ?
Ce jour est à marquer d'une pierre noire pour l'Afrique. Le Maroc est certes un pays africain, mais son régime est un régime colonial à la solde de la France ; il ne mérite pas de s'asseoir sur les bancs de l'organisation qui lutte depuis sa création contre les puissances coloniales. Pour moi, l'acceptation de la demande du Maroc de réintégrer l'UA est la même chose que si le régime d'apartheid, dans les années soixante et soixante-dix, s'était assis parmi les nations africaines alors membres de l'OUA. Qu’auriez-vous pensé de cela ?
Ceci dit, de nombreux défenseurs de la cause sahraouie à l'UA ont accepté la demande marocaine parce que, disent-ils, ils préfèrent traiter le dossier en famille avec le Maroc assis avec eux sous le même toit, plutôt que de maintenir Rabat à l'extérieur, comme c'était le cas jusqu'à présent, et de buter sur son refus constant de permettre que l'UA intervienne dans le conflit. Bon, c'est un argument qui mérite d'être testé. Nous verrons s'il se vérifie ou pas. Mais pour ma part je suis persuadé que le Maroc est revenu dans l'Union Africaine simplement pour deux raisons : premièrement, il veut être membre de l'UA pour modérer la position de celle-ci sur le conflit ou même pour empêcher ses organes de décision d'adopter des positions fermes sur le conflit. Deuxièmement, si Rabat n'atteint pas ce premier objectif il pourra alors mettre en œuvre le second c'est-à-dire provoquer la division voire détruire l'organisation de l'intérieur. Le Maroc est un État brigand qui utilise toutes les formes de corruption et toutes les méthodes d'espionnage pour atteindre ses objectifs dans les organismes internationaux. Souvenons-nous, par exemple, des documents de Wikileaks qui ont révélé il y a quelques années comment l'ambassadeur du Maroc à Genève achetait des diplomates de l'ONU et épiait de hauts fonctionnaires de l'ONU, parmi lesquels Ban Ki-moon et Christopher Ross. Le Maroc continue à utiliser ces méthodes avec de nombreux pays africains. Cela dit, je crains que les autorités marocaines - peut-être ont-elles déjà commencé à le faire - se mettent à rechercher des diplomates et des fonctionnaires africains corrompus pour acheter leurs services afin de contrôler ou de détruire l'UA. Il est évident que nous allons voir cela se produire dans le futur ; et, c'est sûr, il y a déjà des rumeurs et des indices de corruption autour de nombreux politiciens africains, en particulier dans quelques pays historiquement sous influence française.
Saviez-vous que la Présidente sortante de la Commission de l'UA, S.E. Nkosazana Dlamini-Zuma, avait nommé le premier Envoyé Spécial au Sahara Occidental (2014), dans une tentative de résoudre le conflit ? Que pensez-vous du rôle/de l'influence de l'UA dans la recherche d'une solution pacifique aux défis que doit relever votre pays ?
Je dois souligner que S.E. Dlamini-Zuma a beaucoup fait pour le continent africain pendant son mandat, et pas seulement pour le Sahara Occidental. La réussite principale de cette grande dame panafricaniste est rien moins que l'élaboration claire et géniale et l'adoption de l'Agenda 2063, outre de nombreux autres documents importants de politique et de stratégie qui définissent où va l'Afrique et comment elle réalisera ses objectifs et ses aspirations.
Sur la question du Sahara Occidental, Mme Zuma a également réussi d'importantes avancées. Comme vous l'avez dit, elle a nommé le premier Envoyé Spécial pour le Sahara Occidental, mais elle a aussi redonné sa voix à l'UA au sein de l'ONU, y compris au Conseil de Sécurité. Elle a peut-être été la première Présidente de l'UA à imposer la présence et la voix de l'Afrique face aux cinq membres permanents du Conseil de Sécurité, y compris sur la question du Sahara Occidental. Pendant ces quatre dernières années, cette question est devenue un thème majeur dans les divers niveaux  décisionnels des organes de l'UA. De ce fait, de nombreuses décisions, résolutions et déclarations ont été adoptées ; il en a été débattu et l'information à leur sujet a circulé comme jamais auparavant depuis les années quatre-vingt.
Nous devons aussi reconnaître que l'OUA/UA a fait beaucoup pour le peuple sahraoui. Ce qu'elle a fait de plus important a été de reconnaître purement et simplement la République Sahraouie comme membre de plein droit de notre Organisation. C'est, en soi-même, une décision et une position historique de l'UA et un clair rejet des revendications coloniales marocaines.
Mais nous Sahraouis considérons que l'UA est pleinement légitime pour prendre l'initiative dans la recherche d'une résolution du conflit du Sahara Occidental, parce que c'est une affaire africaine. L'ONU n'est pas parvenue à avancer dans ses efforts parce que la France a toujours conspiré avec ses alliés et États marionnettes pour faire échouer les efforts de l'ONU pour résoudre ce dernier cas de décolonisation en Afrique. Nous estimons donc que l'UA doit assumer sa responsabilité sur ce dossier, d'autant plus maintenant que le Maroc en est devenu membre. Rabat ne peut plus refuser que l'UA s'occupe de la question en alléguant qu'il ne reconnaît pas l'Organisation. Nous allons donc voir ce qui se passe.
Croyez-vous que votre pays obtiendra l'indépendance totale vis-à-vis du Maroc ? S'il vous plaît, développez votre réponse.
Bien sûr que oui, parce que j'ai appris de l'Histoire qu'aucun pouvoir colonial n'a réussi à conserver pour toujours le contrôle des territoires colonisés. Tôt ou tard la volonté des peuples triomphe.
En ce qui nous concerne, je suis sûr que nous obtiendrons notre indépendance parce que mon peuple n'a pas renoncé à la lutte. Au contraire, il est décidé à récupérer son futur des mains des usurpateurs de notre terre. Les nouvelles générations, qui n'ont pas vécu les premiers jours d'invasion et d'oppression, sont aujourd'hui celles qui dirigent la résistance. Pour moi, notre lutte est une lutte de toutes les générations et peu importe laquelle verra le grand jour de la liberté ; le plus important pour chacun de nous est de maintenir vive la lutte et d'établir pour elle des objectifs clairs, de sorte que la prochaine génération puisse prendre la suite de la direction du combat et terminer la mission.
D'autre part, le Maroc a toujours eu des positions fluctuantes sur ce dossier, ce qui révèle qu'il est simplement une puissance coloniale intéressée uniquement par nos ressources. Par exemple, dans les années soixante, le roi du Maroc appuyait la lutte du peuple sahraoui pour l'indépendance et il réclamait régulièrement son droit à l'autodétermination et à l'indépendance ; puis, dans les années soixante-dix, il a commencé à conspirer avec l'Espagne et à réclamer la souveraineté sur le territoire ; finalement, il l'a envahi militairement et il a considéré l'affaire comme un "dossier clos", alléguant que le Maroc avait récupéré et libéré sa terre. Ensuite, après 16 années de guerre contre l'Armée Sahraouie de Libération (Polisario), et après avoir compris qu'il ne parviendrait pas à gagner les cœurs des Sahraouis ni le combat, il a à nouveau demandé l'arbitrage international et a accepté le principe d'autodétermination, ce qui veut dire qu'il a reconnu ouvertement que son pays n'a pas de souveraineté sur le territoire. En 2000, le nouveau roi, Mohamed VI, a rejeté le référendum et a dit qu'il offrait seulement une autonomie aux Sahraouis, ce qui est aussi une reconnaissance explicite que le Sahara Occidental ne lui appartient pas. Maintenant, le Maroc est finalement assis à côté de la République Sahraouie sous le même parapluie de l'UA, ce qui pour moi est une simple reconnaissance légale de la RASD, quoi qu'en disent ou quoi que fassent les représentants politiques marocains.  Donc, pour moi, cette position fluctuante du Maroc sur ce dossier est un indicateur solide qu'il finira un jour par reconnaître ses erreurs et qu'il permettra au peuple sahraoui de construire son État librement. Au bout du compte, le colonisateur étranger devra s'en aller.
 

 
 
Quels sont, à votre avis, les principaux défis pour le développement de votre pays ?
J'ai mentionné plus haut l'Agenda 2063 de l'UA ; et je crois que, comme la majorité des nations africaines, nous avons à relever de nombreux défis et nous avons de nombreux objectifs et aspirations dans nos agendas. Mais en tant que Sahraouis nous avons une priorité, c'est la libération de notre pays en premier, ensuite nous devrons tout reconstruire parce que la colonisation marocaine n'a rien construit dans nos villes occupées. L'infrastructure du territoire est quasi-inexistante ; il n'y a pas une seule université dans tout le territoire du Sahara Occidental, qui a la taille de l'Angleterre. Il n'y a ni hôpitaux, ni théâtres, ni cinémas, ni centres culturels, ni usines, rien. La seule chose que le pouvoir colonial a construit ce sont des ports et quelques routes spécifiques qui lui permettent de piller nos ressources naturelles, en particulier le phosphate et le poisson ; et, bien sûr, des prisons, des commissariats de police et des édifices de l'administration coloniale.
Et quelles sont, selon vous, les principales opportunités du pays ? (C'est-à-dire les ressources).
De ce point de vue aussi, comme la majorité des pays africains, le Sahara Occidental est très riche en ressources renouvelables et non renouvelables : gaz, pétrole, phosphates, pêche, or, diamants, fer, sable et de nombreux autres minéraux, ainsi que beaucoup de soleil et un vent fort. C'est pour cela que le Maroc insiste pour maintenir son contrôle. Et, bien sûr, nous sommes aussi un objectif pour la France, parce qu'elle veut avoir un Maroc fort pour conserver un certain équilibre et éviter que l'Algérie devienne la principale puissance en Afrique du Nord.
Par ailleurs, notre peuple, bien que petit en nombre, est bien préparé et bien formé. Ce sera un plus et une force d'impulsion pour la renaissance et le progrès des peuples africains. Notre gouvernement, bien qu'il n'ait pas le plein accès à nos ressources, a une expérience très intéressante dans la gestion des affaires de notre nation, avec des institutions démocratiques et bien établies. Nous avons l'un des gouvernements les plus stables d'Afrique depuis plus de 40 ans, sans aucun problème politique d'importance jusqu'à ce jour. Et le régime médiéval marocain a peur, bien sûr, d'avoir à sa porte une république épanouie et démocratique, qui mettrait en évidence la dictature de sa monarchie et son échec à donner aux Marocains ce qu'ils désirent : la démocratie, la dignité et la liberté.

Si vous vouliez dire aux gens quelque chose qu'ils ignorent sur le Sahara Occidental, que leur diriez-vous ?
Je crois que la majorité des peuples africains ignorent qu'il y a encore en Afrique une colonie et une nation qui se bat pour sa liberté. Beaucoup d'Africains, y compris les Sud-Africains, croient probablement que la lutte glorieuse contre l'apartheid a été la dernière bataille que l'Afrique a soutenue contre l'oppression, contre le colonialisme et la ségrégation. Et bien non, ce n'est pas le cas. Le peuple sahraoui mène en ce moment-même une lutte semblable contre un régime colonial africain qui utilise exactement les mêmes stratégies et la même violence que le régime de l'apartheid a utilisées par le passé contre le peuple.
Je veux donc que tous les Africains comprennent que nous nous battons pour eux, parce que la lutte pour la liberté et l'autodétermination au Sahara Occidental n'est pas le devoir exclusif des Sahraouis. Non, elle est et elle doit être la lutte de tous les amoureux de la liberté sur le continent et en dehors. Non seulement nous luttons contre le régime colonial marocain mais nous luttons aussi contre le véritable pouvoir colonial qui se cache derrière ce régime marionnette, c'est-à-dire la France. Ce pays européen fait tout son possible pour empêcher que notre pays, notre région et notre continent vivent dans la prospérité, l'unité et la liberté. Et le régime marocain joue ses cartes pour faire en sorte que l'Afrique, ou du moins l'Afrique du Nord, reste divisée et incapable de s'unir.
Je veux donc inciter tous les Africains à maintenir leur attention sur cette partie de notre cher continent, parce que le Maroc et la France veulent pousser à nouveau à la guerre, au chaos et aux souffrances. Mais leurs frères et leurs sœurs sahraouis se dresseront contre cette collusion et lutteront jusqu'à la dernière goutte de leur sang. Car nous sommes des Africains libres, qui avons toujours aimé la liberté et l'indépendance, et nous mourrons libres si c'est le prix que nous devons payer à la liberté et à la dignité de tous les Africains.
Photos : peintures murales de l'artiste espagnol M-E-S-A infinito à Tindouf (Algérie), où sont situés les camps de réfugiés sahraouis.